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30 mars 2007

Vu du fond du puits, le ciel est bien petit

David Castéra a écrit un billet intéressant sur l'éventuelle concurrence que pourrait exercer Google sur Second Life par le lancement d'un service basé sur Google Earth et SketchUp. Sa conclusion est simple : cela n'a pas de sens.

Et c'est vrai que cela n'a aucun sens. Même en "se prenant la tête" et en imaginant ce que pourrait faire Google qui ressemble à Second Life, on n'arrive à rien qui lui serait concurrent. C'est normal. Il semble logique que des compagnies établies, comme Google, Yahoo, etc., préfèrent investir des ressources dans des projets bien plus rémunérateurs par l'amélioration et l'extension de services qui entrent dans le cadre de leur "business model" actuel.

De la même façon, je pense que ceux qui comparent PlayStation Home de Sony, ou World of Warcraft, avec Second Life se trompent. Les cibles de clientèle, les services proposés et les modèles de revenus sont différents. Avec Sony, nous sommes dans l'univers du jeu. Même chose avec World of Warcraft. Et Second Life n'est pas un jeu.

Au fond, Second Life ne peut avoir peur de rien, sinon de lui-même. Linden Lab est parfaitement en ligne pour acquérir la taille critique, bénéficier de l'avantage du nouvel entrant et devenir un standard de fait sur un marché nouveau. Même l'émergence de "vrais concurrents" comme HipiHi en Chine ne change rien à la donne : eBay a bien son Taobao. Et les soubresauts techniques de la plate-forme ne sont rien d'autre qu'un épiphénomène lié à une montée en charge impressionnante...

Car Second Life est une innovation de rupture. Lorsque certains disent que Second Life ne présente pas (ou plus) d'intérêt pour les "marques", ils raisonnent selon les schémas traditionnels du Web, même 2.0. Aujourd'hui, il existe des centaines d'entreprises virtuelles dans Second Life, dont certaines commencent à être significatives comme The Electric Sheep Company ou Anshe Chung Studios. Il y a actuellement plus de trente sociétés cotées au World Stock Exchange. Il se développe très rapidement dans Second Life toute une activité économique et commerciale que les e-marketeurs et autres optimiseurs de communication du "vieil Internet" tiennent pour quantité négligeable ou ne comprennent simplement pas. Vu du fond du puits, le ciel est bien petit.

A mon avis, ce qui se passe aujourd'hui dans Second Life, c'est que sont en train d'y naître les Google, Yahoo, eBay, Amazon, E*TRADE, etc. de demain.

10 décembre 2006

Second Life, une innovation de rupture

Quand on dit que Second Life est simplement du "Web à trois dimensions" ou, à l’autre extrême, le jeu d’une "seconde vie", je crois qu'on ne saisit pas du tout ce qui est en train de se passer. Petit rappel : en 1997, Yahoo n'était qu'une "sorte de 11 du Minitel mais pour Internet" et le Web "peinait à se trouver un modèle de revenus", si bien que certains s'interrogeaient sur son avenir.

Lorsque l’on dit que Second Life est un "métavers" (pour "univers métaphysique"), on fait un peu dans l’amphigouri mais, à mon avis, on se rapproche plus de la vérité. Second Life n’est définitivement pas un univers métaphysique, mais c'est un univers, et c'est un univers qui prolonge de façon extraordinaire celui (réel) dans lequel nous évoluons. On n’a jamais dit cela du Web, même pas de celui qu’on a "affublé" du nom de Web 2.0. D’une certaine façon, Second Life, c’est de l’Internet plus "profond" que celui que nous connaissons, créant du virtuel à l'intérieur du virtuel, mais, d'un autre côté, c'est aussi la "fin du tunnel" et le retour vers la réalité : car ce monde-là va se fusionner progressivement avec le monde réel. Voir en particulier ce qu’en dit Anshe Chung.

Il semblerait bien que Second Life soit une innovation de rupture. Pour montrer les implications étonnantes d'un monde virtuel comme Second Life, il suffit de prendre un tout petit exemple : les studios de cinéma. Les mondes virtuels comme Second Life pourraient en effet bouleverser la production de films, tout simplement parce que le coût de production y est proche de zéro ! Un article ancien (avril 2006) de The Economist est très instructif à ce sujet : il calculait que l’investissement en contenu réalisé par les résidents représentait déjà une valeur de 250 millions USD, soit un budget équivalent à celui des grands films hollywoodiens. Imaginons un peu l’effet démultiplicateur de Second Life si on l’applique maintenant à presque tous les domaines d’activité…

Une autre question concerne l’arrivée de concurrents directs à Second Life. Les moyens de grandes sociétés de l’Internet comme Google ou Yahoo sont en effet considérables. Voir ce qu’écrivait Chris Taylor en mai 2006. Mais cela me fait trop penser à ce qui se disait de PayPal à ses débuts. En 2000-2001, j'avais été amené à m'intéresser de très près à la société PayPal et j’avais rencontré ses dirigeants à plusieurs reprises. En janvier 2001, ils revendiquaient 6 millions de comptes ouverts (rappel : plus de 100 millions aujourd'hui) et ils devaient faire face à l’émergence d’un concurrence "impressionnante" : eBay lui-même (où PayPal réalisait une grosse partie de son chiffre d'affaires) avec son outil de paiement propriétaire Billpoint, PayDirect de Yahoo! Auctions, c2it de la puissante Citibank, etc. Ces entreprises disposaient à coup sûr des compétences techniques et des ressources nécessaires pour contrer PayPal, mais la vérité est que toutes ces initiatives ont lamentablement échoué. Pourquoi ? Pour deux raisons, me semble-t-il : 1) l’effet de réseau – PayPal a été le premier à atteindre une masse critique d’utilisateurs à partir de laquelle le système devient un standard de fait, disqualifiant les nouveaux entrants potentiels ; et 2) la culture et l’organisation des grandes entreprises qui constituent dans ce cas précis un obstacle quasiment insurmontable.

A fin 2007, Second Life aura - au moins - entre 5 et 10 millions de résidents. Ce sera un standard de fait. Que la société Linden Lab continue à fonctionner comme aujourd’hui est une toute autre histoire. Voir les prédictions de Hiro Pendragon sur le sujet. Mais Second Life constitue probablement le point de départ d’une révolution Internet sans précédent. Non, ce n’est sans doute pas une bulle, mais bien plutôt une "graine de baobab"…

Non ?